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BLOG DE PHILOSOPHIE
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4 mai 2019

Chapitre ETAT ET SOCIETE

                              SOCIETE ET ETAT

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I. La sociabilité de l’homme

L’homme est un être naturellement social, il est, remarque-t-on avec Aristote,  « par nature un animal politique ».  Il est donc destiné à vivre dans la société, dans la cité. Un être humain ne peut pas vivre naturellement en dehors de la société. Il est possible, comme le dira Aristote, de voir un homme vivre hors de la cité par le hasard des circonstances, pour des raisons circonstancielles. Mais il est, selon le philosophe, impossible de voir un homme vivre naturellement sans les autres, seul et isolé. Celui qui vit naturellement à l’extérieure de la société est, comme le qualifie Aristote, soit « un être dégradé soit un être surhumain ». C’est-à-dire seul un être dégradé, un sous-humain, un être violent, passionné de guerre serait capable de se passer de la cité. Ou bien un être surhumain, c’est-à-dire un dieu, qui n’a nullement besoin de personne, car il est autosuffisant et parfait, pourra vivre solitairement.

En effet, « il est évident que l’homme est un animal politique plus que n’importe quelle abeille et n’importe quel animal grégaire ». Car l’homme est le seul animal parmi les autres animaux doué naturellement de langage. Si la nature a ainsi doté l’homme la capacité de parler, de « manifester l’avantageux, le nuisible, et par la suite le juste et l’injuste», de percevoir le bien et le mal, c’est pour disposer l’homme à la vie commune, c’est-à-dire la vie en famille, en société. L’homme est ainsi l’animal le plus enclin naturellement à la société. Par son langage, sa morale et ses autres facultés humaines, la sociabilité de l’homme est naturellement favorisée.      

Mais cette sociabilité apparente de l’homme cacherait-elle une profonde insociabilité ? Oui selon Kant. La sociabilité de l’homme n’est pas effectivement  au service de la société et de l’intérêt général du groupe, elle est, au contraire, au service de l’intérêt individuel de l’individu. On pourrait ainsi penser avec Kant que si l’homme s’associe avec les autres ce n’est pas naturellement par amour au social mais par intérêt car ce n’est que dans un milieu social que l’individu pourra réaliser ses intérêts individuels et ses ambitions personnelles. Par exemple, un homme qui désire la richesse et qui cherche à s’enrichir devra vivre en société et établir des relations économiques avec ses semblables. Car seul, loin des autres, il ne pourra nullement s’enrichir.

 Rousseau (Hobbes, Hume) ne contredira pas sur ce point Kant. Pour ce philosophe aussi, la sociabilité de l’homme n’est pas naturelle, mais artificielle Il avait de son côté proposée l’hypothèse d’une vie humaine présociale et naturelle. L’auteur du Discours sur l’origine de l’inégalité parmi les hommes (1975) imagine l’homme, avant la société, à l’état présocial, vivant isolé, à l’extérieur de tout regroupement social. Pour Rousseau, l’homme vivait donc originellement sans société, seul, libre et affranchit de toute contrainte sociale. C’est un homme naturellement bon. Il vit dans la simplicité, dans le bonheur.Mais, dans cette situation solitaire, l’homme n’a ni raison, ni langage, ni civilisation, ni morale, il doit nécessairement appartenir à une société pour être civilisé, sociable, moral, véritablement humain. Les hommes finiront donc par instaurer une société afin de sortir de l’animalité (Cf. Hegel).

 

II. Le fondement de la société et de l’Etat

Sur quoi la société se fonde-t-elle ? Qu’est-ce qui maintient le lien social ?

Les besoins nécessaires, répondra Aristote. Comme nous le savons les hommes sont des êtres qui ont des besoins vitaux. Et  comme tous les autres êtres vivants vivant sur terre, les hommes doivent satisfaire leurs besoins vitaux pour pouvoir vivre. La satisfaction de ces besoins nécessite forcément la vie sociale. C’est dans la société, dans la vie collective, que les hommes peuvent donner une véritable satisfaction à leurs différents besoins. De ce fait, l’homme ne peut pas vivre à l’extérieur de la société. Lorsqu’il est seul, à l’extérieur de toute société, l’homme est dans l’incapacité de satisfaire tous ses besoins. C’est, selon le propos de Platon, « l’impuissance où se trouve chaque individu  de se suffire à lui-même » qui pousse les hommes à former des sociétés. De ce fait, sans la société, les hommes sont incapables de satisfaire leurs multiples besoins (vitaux, secondaires). D’où la nécessité d’appartenir à un milieu social.

On avait vu avec Aristote (et Platon) que les hommes se réunissent pour pouvoir satisfaire ensemble leurs besoins vitaux. Sans la société les hommes ne réussiront certainement pas à subvenir à leurs besoins. En effet, intégrant dans la société, les hommes font décider de diviser le travail entre eux. Un seul homme ne peut pas tout seul s’occuper de plusieurs activités : s’il est agriculteur, il ne peut pas en même temps être un guérisseur, car ce dernier sera beaucoup occupé par la culture de son champ. De ce fait, les hommes divisent les tâches et se spécialisent sur des activités différentes. Il y a ceux qui cultivent la terre pour produire aliments et fruits. Il y a ceux qui élèvent des moutons, des vaches, des chameaux pour produire du lait et de la viande, ceux qui guérissent les malades par des plantes dont ils connaissent les secrets médicinaux…

Et par la suite, chacun, ayant produit ce que les autres n’ont pas et lui-même manquant ce que les autres produisent, sera amener à échanger ses produits contre les produits des autres. Les hommes font ainsi échanger entre eux leurs produits respectifs afin de pouvoir subvenir à leurs besoins respectifs. Se développent ainsi entre les hommes des multiples échanges économiques. C’est sur ces relations économiques qu’Adam Smith fondera le maintient de la société. Ce sont, selon lui, ces relations économiques qui fondent la société et maintiennent le lien social.

Mais comment expliquer le passage de la société à l’Etat ? Pourquoi les hommes acceptent-t-ils de se soumettre à des institutions et à un pouvoir politique au détriment de leur liberté ?

Pour les philosophes du contrat social (Rousseau, Hobbes, Locke), le besoin d’instituer une société (et surtout une société politique : un Etat) s’explique par un besoin de sécurité, de paix, d’ordre (HOBBES), de liberté (ROUSSEAU) et de Bien, de justice (ARISTOTE). Car, comme vue dans l’analyse précédente, l’état de nature est généralement peint par les philosophes comme un état de violence, d’insécurité. Cet état hypothétique est, selon Hobbes,  un état invivable, un état de guerre, un état dans lequel la liberté et la vie de l’homme sont en danger, c’est un état d’insécurité totale. C’est pour sortir de cet état de violence que les hommes établissent le pouvoir politique (l’Etat).

C’est particulièrement le philosophe anglais Thomas Hobbes qui a le plus souligné la violence et l’insécurité dans l’état de nature. Hobbes explique que les hommes se livrent, à l’état de nature, une guerre permanente et violente, et, par conséquent, ils vivent en permanence dans la peur de mourir et de perdre leur vie à tout moment. Car qui dit guerre, dit aussi mort. De ce fait, poussés fondamentalement par une passion d’autoconservation, de préserver leur vie, les hommes font donc privilégier la vie à la mort, la paix à la guerre, la sécurité à l’insécurité, la vie civile (politique) à la vie naturelle (sauvage). L’homme mettra ainsi fin, sur la base d’un contrat social volontaire, à son état de nature, parce que cet état est contraire à son désir profond de converser sa vie. Par conséquent, les contractants vont renoncer par nécessité à leur souveraineté individuelle et à leur liberté naturelle en faveur d’une souveraineté politique, c’est-à-dire d’un souverain jouissant d’un pouvoir absolu capable d’assurer la sécurité et la paix  pour le peuple.

Mais la vie civile ne pourrait-elle pas être plus dangereuse que celle naturelle dans le sens où le pouvoir est exercé par un souverain absolu ? Ne risque-t-on pas de prolonger la violence de l’état de nature mais sous une autre forme ? Et la liberté de l’homme dans tout ça ?

Avec Rousseau, on peut s’indigner du contrat social à la Hobbes. Le contrat que propose Hobbes est, comme le pense l’auteur du contrat social, un contrat « incompatible avec la nature de l’homme », car il ôte l’homme de sa dignité, de sa liberté, de ses droits. Ce contrat indigne ne peut guère garantir la sécurité du peuple puisqu’il accorde au souverain un pouvoir absolu et, ce faisant, assujetti le peuple à ce souverain, car rien ne pourrait leur protéger de l’arbitraire de son pouvoir (déportation, fusillade, assassinat, emprisonnement….). Amoureux de la liberté, Rousseau ne veut surtout pas un contrat qui sacrifie la liberté à la sécurité, mais un contrat qui assure la sécurité tout en garantissant la liberté de chacun, il s’agit donc, pour lui, de « trouver une forme d’association qui protège et défende » les biens et la sécurité de chaque associé et dans laquelle chaque membre « reste aussi libre qu’auparavant ». Et cela n’est possible que si les contractants transfèrent le pouvoir non pas aux mains d’un souverain absolu (un prince, un groupe de gouvernants) mais à la volonté générale. Ainsi, avec Rousseau, le contrat doit se contracter entre chaque particulier et la communauté politique et non entre les particuliers comme Hobbes (entre chaque particulier du peuple et le souverain)

 

III. Quel rapport entre Etat et société ?

 

Dans une société politique, la relation entre les gouvernants et les gouvernés n’est pas naturellement fondée sur l’amour et l’affection. Ce n’est pas une relation naturelle : amicale ou familiale. Seule, comme nous le fait remarquer Rousseau, la famille, « la plus ancienne de toutes les sociétés », repose sur un « lien naturel » entre les parents et les enfants. Le père s’occupe de ses enfants naturellement, il veille sur eux tant qu’ils ont besoin de lui. Le père (et la mère aussi), entretient donc avec ses enfants une relation naturellement affective.

Mais, comme le constate bien le philosophe, dans la société politique, il y a des intérêts, mais pas d’affection et d’amour. Le gouvernant (le chef) n’a pas un amour naturel pour son peuple. Le gouvernant n’aime pas son peuple comme il aime sa famille, ses enfants. S’il a à choisir entre son peuple et sa famille, il choisira,  probablement pour ne pas dire certainement, sa famille et non pas son peuple. Si le gouvernant serve son peuple, ce n’est pas par nature, mais par intérêt, car pour jouir du bénéfice (avantage) lié à la gouvernance (le pouvoir) il doit satisfaire son peuple. Il est dans son intérêt de bien prendre soin des besoins et de la vie de ses gouvernés pour pouvoir en retour continuer à gouverner et préserver son poste et ses avantages (statut social, désir de pouvoir, de gloire, de richesse et autres avantages). Un peuple affamé et sans aucun espoir explose sur la face de ses gouvernants et les chassent du pouvoir par le vote (dans une démocratie) ou par la révolution (dans une dictature). L’Etat ne repose donc pas comme la famille sur un lien affectif. Le manque d’affection du gouvernant (président, roi, premier ministre, etc.) pour son peuple marque la fragilité de la société politique et donc du lien entre les gouvernants et les gouvernés.

Ce défaut d’affection entre l’Etat (le gouvernant) et la société (le gouverné) pourrait être à l’origine d’un rapport violent entre l’Etat et la société : L’Etat n’hésite pas quand il voit son avantage menacé à recourir à la violence et à l’oppression de la société et des gouvernés. C’est surtout les régimes totalitaires et tyranniques qui se sont illustrés par l’oppression, le massacre du peuple (Monarque, Empereur, dictateur, etc.) Dans l’oppression l’Etat détourne sa « violence légitime » et sa force publique (Police, militaire, justice) déléguée à celui-ci pour assurer l’ordre public et l’intérêt général, contre le peuple pour défendre un intérêt particulier, partisan, familial, etc. De l’autre côté, la société (le peuple) est capable de faire violence sur les gouvernants, la masse sociale est capable de se révolte contre le gouvernant, de le renverser, voire même de le tuer (Cf. la révolution française, le printemps arabe, etc.). Dans un système politique démocratique, pour empêcher l’abus du pouvoir et la violence illégitime du gouvernant sur le peuple, le pouvoir de chaque institution (et de chaque gouvernant) est arrêté par le pouvoir d’une autre institution (Cf. Montesquieu). Cette séparation des pouvoirs assure un équilibre entre les différentes institutions de l’Etat, mais aussi entre les gouvernants et les gouvernés (Cf. démocratie et pouvoir du peuple).

L’Etat pourrait réussir à réaliser plusieurs choses dans la vie sociale : la sécurité, l’ordre, la liberté, le bien-être social et tant d’autres belles choses. Mais, en lisant Karl Marx, on pourrait dire qu’aucun Etat n’a réussit de réaliser parfaitement la justice sociale et l’égalité sociale. Dans toutes les sociétés, même dans les sociétés les plus développées et les plus démocratiques, existe toujours une flagrante inégalité sociale. La richesse produite par la société est très inégalement répartie entre les individus de la société. Comme il est possible d’observer dans toute société, une petite minorité détient l’essentielle de la richesse nationale. La majorité écrasante de la population se répartit une toute petite partie de cette richesse. Se dessinent donc, comme nous le fait constater Marx, deux classes sociales : la classe bourgeoise et la classe prolétaire. Cette injustice sociale mine la paix et le vivre-ensemble dans la société.

Mais alors l’Etat ne peut-il pas remédier à cette injustice sociale ? Le pouvoir politique n’est-il pas capable de réaliser une justice sociale et une répartition juste de la richesse ?

A en croire Karl Marx, le système politique est lui-même responsable de cette situation. L’Etat serait lui-même au service d’une petite minorité : la bourgeoisie. C’est l’Etat d’une classe. Il favorise la classe riche (bourgeoise) et défavorise la classe pauvre (ouvrière). En permettant l’expropriation de la classe pauvre, l’acquisition des moyens de production par les riches. L’Etat participe ainsi, activement ou passivement, à l’appauvrissement des producteurs et à l’enrichissement des patrons. Selon ce philosophe, au lieu de construire une société économiquement juste, de concrétiser la justice sociale au sein de la société, l’Etat apporte l’injustice, la misère, l’exploitation dans le corps social. C’est pourquoi Karl Marx appelle à la destruction de l’Etat. Car détruire l’Etat, c’est, à ses yeux, détruire un système économique injuste, inégalitaire, exploitant, déshumanisant qui génère misère, pauvreté, malheur. 

Mais est-il possible véritablement de vivre en société sans l’Etat ? Sa disparition ne peut-il pas provoquer immédiatement le désordre et le chaos ? La destruction de l’Etat n’est-il pas synonyme d’anarchie?

Si Karl Marx appelle à la destruction de l’Etat, cela ne signifie pas qu’il est pour la fin totale et définitive de celui-ci. Karl Marx souhaite seulement la disparition de l’Etat dans sa forme actuelle (capitaliste, libérale, etc.) Il veut que les ouvriers s’approprient de leur richesse et qu’ils exproprient les bourgeois de leurs biens de production et de leur richesse afin de rétablir la justice sociale et répartir justement la richesse collective de la société. Il est contre le système capitaliste ;  il veut mettre un terme à ce système et son moteur qui n’est autre que l’Etat capitaliste. Mais par la suite, il n’écarte pas complètement la possibilité de vivre dans des communautés politiques organisées. On ne peut pas donc qualifier entièrement Karl Marx d’anarchiste. Son anarchisme est provisoire et transitoire pour aboutir par la suite à une société politique mais communiste, égalitaire et humaniste. Une société socialement et économiquement plus juste  que celle capitaliste.

Le véritable anarchisme est lui contre toute forme d’Etat ou d’organisation institutionnelle. Les vrais anarchistes conçoivent l’Etat comme une forme d’esclavage et de soumission. Car, pour la pensée anarchiste, l’homme est la valeur suprême, il ne doit pas être subordonné à la volonté d’un autre homme ou d’une quelconque institution politique, L’Etat est donc, pour eux, contraire à la liberté et à la nature humaine. Ce n’est que dans son absence que les hommes peuvent s’épanouir et non en sa présence. La pensée anarchiste rêve donc d’une société humaine sans Etat, sans autorité politique, sans commandement. Une société libre de toute politique institutionnelle, de toute gouvernance politique.

En effet, pour un anarchiste, les hommes peuvent harmonieusement vivre en société sans la présence de l’Etat. Le problème, c’est l’Etat, ce ne sont pas les hommes dira l’anarchiste. L’anarchiste pense ainsi que les hommes peuvent naturellement et fraternellement vivre ensemble sans guerre et en paix. Les anarchistes s’attachent à une conception très idéaliste de la nature humaine et imagine une société humaine autogestionnaire et prospère. Sans l’Etat, les hommes seraient prospères, frères, heureux, épanouis et libres. Ainsi, contrairement à la conception pessimiste que certains philosophes ont de la nature humaine qu’ils décrivent comme méchante et violente (Cf. Hobbes), les anarchistes sont extrêmement optimistes, peut-être même trop naïvement, quand à la nature humaine. Si Hobbes, Kant et d’autres voient en l’homme un être naturellement méchant avec, à l’état de nature, une liberté sauvage qu’il faudrait civilement limiter et restreinte afin d’éviter un abus de l’homme sur l’homme, un Max Stirner, au contraire, refuse toute forme d’Etat, qu’il soit libéral ou non. Car tout Etat incarne, comme il le pense, une souveraineté politique qui supplante la souveraineté individuelle des citoyens. D’où le slogan anarchiste : « ni maître, ni dieu ».

 

 

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