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BLOG DE PHILOSOPHIE
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3 janvier 2020

EXPLICATION DU TEXTE DE HUME

 

                     EXPLICATION DU TEXTE DE HUME SUR LE MOI

 

« Il y a certains philosophes qui imaginent que nous avons à tout moment la conscience intime de ce que nous appelons notre moi ; que nous sentons son existence et sa continuité d’existence ; et que nous sommes certains, plus que par l’évidence d’une démonstration, de son identité et de sa simplicité parfaites. [… ]

Pour ma part, quand je pénètre le plus intimement dans ce que j’appelle moi, je bute toujours sur une perception particulière ou sur une autre, de chaud ou de froid, de lumière ou d’ombre, d’amour ou de haine, de douleur ou de plaisir. Je ne peux jamais me saisir, moi, en aucun moment sans une perception et je ne peux rien observer que la perception. Quand mes perceptions sont écartées pour un temps, comme par un sommeil tranquille, aussi longtemps je n’ai plus conscience de moi et on peut dire vraiment que je n’existe pas. Si toutes mes perceptions étaient supprimées par la mort et que je ne puisse ni penser, ni sentir, ni voir, ni aimer ni haïr après la dissolution de mon corps, je serais entièrement annihilé et je ne conçois pas ce qu’il faudrait de plus pour faire de moi un parfait néant. »

                                                                                                    D.HUME, Traité de la nature humaine (1740)

 

Avertissement.

Les titres ne doivent pas apparaitre sur la copie de l’élève lors de l’explication de texte. Ils sont utilisés ici seulement dans le but de permettre aux  élèves de bien suivre les étapes de l’explication.

 

INTRODUCTION

L’homme a-t-il une identité stable et continue ? Somme-nous définis par notre moi ?  Á ces questions, David Hume propose dans ce texte une réponse négative. La thèse que propose le philosophe dans ce texte constitue une rupture avec la conception classique affirmant l’identité et la stabilité du moi. L’auteur développe ici une antithèse à la thèse cartésienne. Contrairement à Descartes, et d’autres qui soutenaient la continuité et l’identité du moi, Hume explique que le moi n’existe pas, et que le sujet n’a pas une identité stable. Notre identité est illusoire, car l’analyse de notre intérieur intime prouve que nous sommes une succession de perceptions multiples.

Le texte se développe en trois étapes : dans un premier temps, Hume introduit la conception du moi qui dominait traditionnellement la philosophie du sujet. Puis, dans une deuxième étape, il montre que le moi n’est pas stable. Et enfin, il montre que les perceptions conditionnent le moi.

DEVELOPPEMENT

Le texte commence par : « il y a certains philosophes qui imaginent… ». Hume ouvre son texte par l’avis de certains philosophes sur le sujet qu’il s’apprête à traiter ici. Qui sont ces philosophes ? On ne les connait pas. L’auteur ne les nomme pas ici. Il ne nous donne pas des noms. Il préfère nous proposer leur idée plutôt que leurs noms. Mais on peut comprendre qu’il s’agit de tenants de la philosophie métaphysique. Ces philosophes dont l’auteur fait allusion ici sont probablement Descartes,  Berkeley… Le philosophe étale sur trois étapes la thèse de ces philosophes. Tout d’abord, il affirme qu’ils pensent que « nous avons à tout moment la conscience intime de ce que nous appelons notre moi ». Pour ce groupe de philosophes, l’homme a une « conscience intime » de son identité, de son moi. Cette conscience de notre moi est continue, elle ne s’arrête pas. Elle est présente à « tout moment ».

On apprend aussi qu’Ils pensent que « nous sentons son existence et sa continuité d’existence ». On comprend bien donc que pour ces philosophes l’existence de ce moi et cette identité peuvent se sentir chez chaque individu conscient. Chacun d’entre nous pourrait la sentir, sentir son existence, sentir en permanence ce moi car son existence est continue, sans arrêt. Et enfin, ils pensent, selon Hume, que cette identité est certaine, indubitable. Elle n’a pas besoin d’être démontrée car elle est évidente, claire, sûre, simplement accessible par le commun des mortels.[1]

 

Dans une deuxième étape du texte, Hume propose sa pensée à propos de l’identité du moi. Il partage avec le lecteur son aventure intérieure. Si ce moi est évidente et d’une simple accessibilité, n’importe qui pourrait donc la rencontrer en plongeant dans la profondeur de son intimité. D. Hume tente ici cette aventure. Il pénètre intimement et profondément dans son moi. Que découvre donc le philosophe dans son intérieur ? A-t-il saisit son moi ? Hume nous surprend : il ne découvre pas un moi, mais à la place une perception. Quand j’immerge dans mon supposé moi, nous dit Hume dans ce texte, je me bute sur une « perception particulière », c’est-à-dire sur une perception quelconque. Si je replonge une deuxième fois dans ma profondeur, je me bute encore une fois sur une autre perception.

Hume découvre donc que le sujet est composé de perceptions multiples. Il n’a aucune identité stable, même pas une perception stable. Il défile plusieurs de ces perceptions : une perception de « chaud », de « froid », de « plaisir », de « douleur », de « lumière », d’ « ombre ». Par ces diverses perceptions, Hume veut nous montrer qu’il n’y a aucune identité, stabilité, unité à l’intérieur de l’être conscient. Il est un chaos, un désordre, un changement : les perceptions changent, se contrastent, se diversifient. Chaque moment, je suis quelqu’un de nouveau, avec une nouvelle perception, avec un nouvel état… Je change constamment.

On soupçonnait déjà que Hume critiquerait la thèse proposée au début de son texte, il la critique directement ici. Ainsi, pour Hume, il n’y a aucun moi saisissable indépendamment de toute perception. On observe, selon ses dires, que des perceptions et jamais un moi. En effet, Contrairement à Locke, Descartes… qui affirmaient l’existence d’un moi et d’une identité stable chez l’homme,  Hume affirme, de son côté, qu’il n’existe aucun moi, aucune identité chez l’homme, car l’homme n’est qu’une somme de perceptions multiples et changeantes.

Contrairement à la philosophie rationaliste, à la philosophie métaphysique qui place la raison, l’esprit, la pensée au centre du sujet, D. Hume, quant-à-lui, fidèle à sa philosophie empiriste valorise ici l’expérience sensible, la sensation, la perception, l’impression. Rappelons que pour Hume toute la connaissance de l’homme vient de l’expérience sensible, et plus concrètement de l’impression vivace que les sensations impriment sur notre esprit. C’est la réalité extérieure (le monde sensible) qui est première par rapport à l’esprit, à la raison (au monde intérieur et psychique). L’esprit ne serait donc aucunement pour la philosophie empiriste la source de nos connaissances, ce n’est pas lui qui produit la connaissance. Il ne serait pas au centre de notre connaissance, il n’en serait que le récepteur passif. De ce fait, la connaissance ne serait pas intérieure, mais extérieure, résultat de l’expérience, de l’habitude, de la perception.

 

Mais la perception n’est-elle pas l’arbre qui cache la forêt ? Ne faut-il pas aller au-delà des perceptions pour dévoiler le moi ? D. Hume est conscient de ces critiques. Il va donc, dans la dernière étape de son argumentation, s’efforcer de dépasser les perceptions pour voir s’il y a un moi qui se cache derrière ces apparentes perceptions. Alors Hume s’intéresse au moment où nous dormons. Quand nous dormons, nous n’avons aucune perception de nous, de notre intérieure, mais aussi du monde extérieur. Dans le « sommeil tranquille », les perceptions sont écartées, elles s’éclipsent. S’il existe un moi extérieur à la perception, c’est le moment de le voir, de le rencontrer. Que reste maintenant de nous, de notre moi ? Rien, dira Hume. Il ne restera plus rien de nous. Nous disparaissons aussi. Et donc encore une fois, le moi ne se profile pas à l’horizon, ne se montre pas. Si le moi ne se montre pas, ce n’est pas qu’il se cache, mais c’est parce qu’il n’existe pas. Le moi n’est qu’une illusion. Et puis, je me réveille, et les perceptions reviennent. Aucun moi là aussi que des perceptions.

Et si ces perceptions ne reviennent pas. Si elles disparaissent pour toujours, définitivement supprimées par la mort, je disparaitrais à jamais. Si je cesse de « penser », de « voir », de « sentir », d’ « aimer », de « haïr », je cesse aussi d’exister. Je ne suis plus. Mon moi ne sera plus. La mort supprime les perceptions et dissolve le corps. Et il ne restera plus rien de moi. Je serais un « parfait néant ». Un rien. Par conséquent, ce sont les perceptions qui nous composent, nous sommes des perceptions. Si nos perceptions disparaissent momentanément ou définitivement, nous disparaissons avec elles. Aucune autre chose distincte de nos perceptions ne pourrait nous définir, rien d’autre. Notre intérieur, notre soi-disant moi ne peuvent exister sans les perceptions. L’homme est conditionné par la perception. Hume arrive donc à conforter sa thèse empiriste à la fin de son texte et établir la primauté de la perception, de l’expérience sensible sur l’esprit, la raison, le moi pensant.

 

CONCLUSION

Dans ce texte, Hume critique la philosophie classique du sujet. Avant lui, la philosophie idéaliste avait attribué au sujet conscient, au moi une identité stable, évidente, continue. Le cogito chez Descartes, « la conscience » chez Locke, constitue l’identité stable du moi. Mais Hume s’oppose à cette philosophie. Dans ce texte, il montre précisément l’illusion du moi. Selon lui, il n’existe pas chez l’homme un moi stable, continu et saisissable. A la place, il propose des perceptions variables, changeantes, multiples et instables. Nous sommes la somme de ces perceptions particulières, nous n’avons aucune identité indépendamment de ces perceptions. Rien d’autre ne pourrait nous définir et constituer notre identité. La preuve, quand ces perceptions disparaissent momentanément lors du sommeil, nous ne sentons rien, nous n’existons plus. Et quand elles disparaissent à jamais, détruites par la mort, nous devenons un « néant » définitif. Rien ne restera de nous, ni notre moi, ni notre identité… D’une manière générale, ce texte reflète l’opposition philosophique entre le rationalisme et l’empirisme.



[1] Cette situation pourrait troubler l’élève qui lit ce texte ou qui l’explique. L’élève pourrait penser que les idées proposées par Hume au début de son texte sont les siennes. Il pourrait donc penser, en lisant la suite du texte, que l’auteur se contredit lui-même. Ce qui n’est pas le cas. Il faut donc bien distinguer l’idée rationaliste introduite par Hume de sa propre idée empiriste, critique à l’égard de l’idée rationaliste précédemment introduite.

 

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Commentaires
P
Je trouve cette pesée hyper cool . mais j'ai des critiques que je préfère ne pas avancer
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