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BLOG DE PHILOSOPHIE
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16 avril 2020

INTERPRETATION

interpretation

                   

          INTERPRETATION

 

I. La nécessité de l'interprétation

L’interprétation, c’est la recherche de sens. Elle nous permet de donner une signification à un signe. Lorsque j’interprète une chose, je veux découvrir sa véritable signification. On interprète une chose quand sa signification n’est pas claire. Et dans notre rapport au monde sensible, nombreuses sont les choses que nous ne comprenons pas le sens. C’est pourquoi on peut dire que l’interprétation est une pratique nécessaire chez l’homme. Habité par le souci de comprendre, sans l’interprétation, l’homme risque de ne pas comprendre une bonne partie des choses.

C’est dans la communication langagière que l’interprétation est centrale. Car, dans la communication, les communicants utilisent des signes linguistiques pour transmettre un sens chacun à l’autre. Le langage implique un signifié, ce qu’on veut signifier (une idée, un sentiment, etc.) et un signifiant, le signe qu’on utilise pour signifier le signifié. Les signes qu’on utilise dans la communication signifient ainsi toujours quelque chose et portent donc une signification. Pour comprendre les sens portés par les paroles et les mots de notre interlocuteur, il faut nécessairement se munir d’interprétation. Le sens dépendra de la manière que nous avons à interpréter la parole de l’autre. En fonction de notre interprétation, on pourra avoir une idée plus ou moins précise de la parole de l’autre.  

La communication fait donc appelle nécessairement à l’interprétation pour être efficace. Sans elle, une véritable communication ne sera pas possible. En effet, une parole ironique ne signifie pas véritablement ce qu’elle affirme ; c’est souvent le contraire de ce qu’on dit qu’il est signifié. Du moins, le sens réel est loin du sens affiché. C’est seulement un effort d’interprétation qui nous permettra de savoir le vrai sens derrière une parole ironique.

 La psychanalyse aussi fait beaucoup recours à l’interprétation pour décrypter les désirs inconscients des hommes. La psychologie de l’homme est, dans la psychanalyse, elle aussi sujette à l’interprétation. C’est surtout le père de la psychanalyse, Freud, qui avait largement développé sa théorie sur l’analyse du psychisme de l’homme pour pouvoir accéder à son inconscient profond. La psychanalyse envisage l’inconscient comme un langage codé à interpréter comme le langage verbal (J. Lacan).

Freud a voulu ainsi faire une interprétation des désirs refoulés par la conscience humaine en analysant les faits et les gestes de ses patients. Pour étudier le monde psychique de l’homme, il va étendre son analyse psychique sur les comportements humains. Ainsi, il va prétendre décrypter le rêve de l’homme en interprétant le contenu de celui qui rêve. Il va aussi interpréter les comportements de ses patients pour pouvoir expliquer les désirs inconscients responsables de leurs dysfonctionnements psychiques ou psycho-somatiques. Il a prétendu avoir guérit plusieurs de ses patients avec sa psychanalyse.  

Mais c’est surtout dans le monde théologique que l’interprétation est la plus présente et plus problématique. Car l’interprétation est plus délicate quand il s’agit d’interpréter la parole de Dieu. Les grandes religions monothéistes reposent sur des livres sacrés qui contiennent la parole de Dieu destinée aux hommes. Il ne s’agit pas ici d’une communication entre l’homme et son semblable, mais entre l’homme et son créateur, son supérieur. C’est une parole sacrée qui doit être maniée d’une manière très respectueuse. Car c’est une parole très vénérée. Aussi la parole de Dieu n’est pas toujours d’un accès facile. Les savants religieux ne se mettent pas toujours d’accord sur le sens de telle ou telle parole de Dieu.

A ce sujet, dans l’islam, les exégètes et les savants peuvent interpréter différemment certains passages du Coran. Certains proposent une interprétation littérale du texte à saisir alors que d’autres privilégient une interprétation contextuelle qui fait appel à des éléments extérieurs au texte à interpréter. C’est pourquoi l’islam est aujourd’hui multiple, qu’il se divise en deux grandes branches (Chiite et sunnite). Chaque branche se sous-divise à son tour en plusieurs courants islamiques. Par exemple, la branche sunnite se sépare en 4 principaux courants : la shaféite, le hanbalite, le hanafite et le malikite.

 

II. Interprétation et vérité

L’interprétation vise, comme on vient de le voir, à dévoiler le réel pour saisir la véritable signification de l’objet interprété. Comme la démonstration, elle vise donc la vérité. Mais, à la différence du raisonnement démonstratif, l’activité d’interprétation manque de méthode. Elle ne possède pas une méthode scientifiquement rigoureuse telle que la démonstration pour pouvoir assurer l’accès à la vérité. Sa première faiblesse est qu’elle n’est pas donc objective comme la démonstration. Pour saisir la vérité, il est indispensable d’avoir une méthode objective. Seule une méthode objective permettra de nous conduire à la vérité. Or, comme c’est évident, l’interprétation ne remplit pas cette exigence d’objectivité.

Elle est une activité qui laisse parler son subjectivité. Elle est sans doute subjective. Elle exprime le point de vue du sujet interprétant de la chose interprétée. Chaque interprétation dépend du sujet interprétant. Mon interprétation sur une chose peut ainsi différer de celle d’une autre personne sur la même chose. Il serait donc difficile de dire si une interprétation est vraie ou pas. Car la vérité est universelle, elle est objective. Alors que l’interprétation est subjective, et donc multiple et relative. Chacun dira que son interprétation est la bonne. Ainsi interprétation et vérité ne sont pas synonymes. L’interprétation divise alors que la vérité rassemble. L’interprétation oppose alors que la vérité rapproche.

Par ailleurs, l’interprétation peut être source d’ambiguïté et de conflit. Car elle n’admet pas une vérité unique et universelle. Et c’est surtout valable dans les sciences humaines dans laquelle l’interprétation a toute sa valeur. L’homme est un être complexe dont l’explication est impossible. Toutes les sciences dont l’homme est l’objet ne peuvent pas être expliquées scientifiquement, mais elles ne peuvent être qu’interprétées. A ce propos, l’histoire de l’humanité peut être interprétée par les historiens : les causes des événements, les circonstances des événements historiques, les acteurs, etc. Les interprétations historiques de l’histoire sont souvent divergentes. Il n’existe pas une seule version d’interprétation historique valable pour tout le monde.

A ce sujet, par exemple, et sur le plan théologique, dans l’islam, vous avez ceux qui suivent une conception très rigoureuse de la religion et ceux qui sont qualifiés de modérés. Dans la religion, entre Dieu et l’homme, il y a toujours un autre homme : un prêtre, un savant religieux quelque soit sa religion. Si nous n’avons pas une même conception de l’islam, par exemple, c’est à cause des manières d’interprétation différentes qui nous mènent à des manières différentes de vivre avec sa croyance. Si, dans le monde musulman d’aujourd’hui, nous avons des musulmans qui se font de l’islam une idée salafiste très rigoureuse qui fait ravage dans nos sociétés musulmanes et qui s’exportent aussi à l’étranger en atteignant le monde non-musulman, c’est à cause d’une interprétation textuelle et littéraliste du Coran indépendamment d’une considération contextuelle plus large. Le légitime droit de défense de soi, de sa famille, de son honneur, de ses biens, devient un droit à l’assassinat des innocents civils, à la destruction, au terrorisme, à la violence gratuite, à la barbarie, etc. D’où l’importance d’une interprétation éclairée, critique, rationnelle et même philosophique du religieux.

L’interprétation loin de nous mettre en phase avec la vérité, nous renferme parfois dans des faux préjugés. En ce sens, ne savant pas les cultures des autres, on pourrait se faire des préjugés en voyant certains comportements ou actions qui sont étrangers à la notre. A ce sujet, concernant le voile de la femme musulmane, beaucoup des non musulmans (occidentaux et autres) pensent que la femme musulmane voilée est une femme soumise et dominée. Ils considèrent le voile comme un signe de soumission de la femme à l’homme et une forme d’exclusion de la femme de l’espace public et de la vie sociale. Ce n’est pas toujours faux. Dans des pays soumis à un islam d’Etat radical et rigouriste, dans lequel ni la femme ni l’homme ne dispose de liberté individuelle, le voile peut être justement jugé comme une imposition extérieure.

Mais, dans la grande majorité du monde musulman où la femme jouit de la liberté de porter le voile ou pas, les choses se présentent autrement. Beaucoup de femmes musulmanes, dans nos pays musulmans libres, choisissent de ne pas porter un voile intégral. Beaucoup d’autres femmes choisissent, elles, librement et sans obligation extérieure de porter le voile : c’est un choix libre et assumé. C’est même une joie pour certaines femmes d’avoir la chance de porter le voile comme elles le veulent alors qu’il est interdit aux femmes de confession musulmane dans certains pays occidentaux les plus démocratiques de jouir de cette liberté. Comme c’est le cas en France où la loi française interdit à la femme musulmane française de porter le voile dans l’espace public.

L’interprétation doit donc être prudente quand il s’agit des comportements des autres cultures : elle doit être plus compréhensible, plus respectueuse à la différence de l’autre et moins exclusive. La sage attitude philosophique doit nous mettre à l’abri d’une interprétation qui préjuge, qui exclut, qui discrimine. La différence culturelle doit être envisagée comme une richesse de l’humanité et non toujours comme une barbarie ou une infériorité.

Pour finir, l’interprétation est reprochée de condamner l’homme à l’inaction. C’est ce que pense Karl Marx de la philosophie qui interprète. Pour l’auteur du Capital, le monde a besoin de changement et de révolution et non seulement une interprétation. L’interprétation doit donc pouvoir transformer la réalité. Karl Marx souligne le risque d’une interprétation qui empêche d’agir. Il faut interpréter mais il faut aussi agir. Pour le philosophe, le monde dans lequel nous vivons est injuste économiquement et socialement. C’est un monde capitaliste déshumanisé. Et c’est surtout la classe ouvrière, la masse prolétaire, qui doit mener cette transformation pour rétablir une justice sociale et économique. Karl Marx laisse l’interprétation aux intellectuels tels que les philosophes pour interpréter le monde et demande aux ouvriers de changer leur réalité socio-économique.

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