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BLOG DE PHILOSOPHIE
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29 avril 2020

LE VIVANT

le vivant image

                    LE VIVANT

 

I. Le propre du vivant

Le vivant se distingue de la matière inerte et des autres objets sur plusieurs caractéristiques qui lui sont propres. Tout d’abord, comme le fait bien constater Aristote, l’«animé se distingue de l’inanimé par le fait qu’il est en vie ». Le vivant se définit donc distinctement des autres êtres par la vie, il se distingue de tous les autres êtres non-vivants de son organisme vivant. Tout être vivant dispose d’un principe vital, d’une vie pour pouvoir vivre. C’est ce principe vital qui anime l’être vivant, sans la vie, il n’y aura aucune différence entre un vivant et les autres matières inertes.

Le vivant forme ainsi ce qu’on appelle un organisme. C’est un corps organisé, composé d’un ensemble d’organes interdépendants et coordonnés entre eux. Chaque organe joue un rôle déterminé dans l’organisme et concourt aux fonctions des autres organes. En effet, un être vivant est un tout indivisible. Il forme un tout qu’on ne peut pas diviser. Si on le divise, il ne sera plus. Il meurt. Il n’existera plus. Pourquoi alors le vivant meurt-il s’il est divisé ? Si l’être vivant meurt si divisé c’est qu’il est un être composé d’organes interdépendants. Il est organisé en différents organes qui communiquent entre eux et qui sont dépendants les uns des autres. Ainsi, si certains de ses organes sont détachés du tout, l’organisme vivant ne pourra plus correctement fonctionner ou au pire ne plus fonctionner du tout.

Ce qui n’est pas le cas des autres êtres non vivants. Un être non vivant est divisible en plusieurs parties. Contrairement à l’être vivant, l’être non vivant ne disparait pas complètement après sa division. Prenons l’exemple d’un bois, on peut le découper en plusieurs morceaux, et au bout du compte, on aura toujours du bois en face de nous. Aussi une matière telle que la pierre ne connaît aucune organisation interne. C’est un corps inerte qui si divisé sera séparé en différentes parties sans dépendances entre elles. Chaque partie sera, après division, une partie à part et indépendante des autres parties auxquelles elle était auparavant attachée.

Dans le monde du vivant, la vie se manifeste par la « croissance » (Aristote). Un être vivant a la particularité aussi de croître. Il se développe et croît au fur du temps. Cette capacité de croissance est inhérente à la vie. Tout être portant une vie est capable de croissance. Un être humain, par exemple, connaît une croissance physique et aussi mentale. Au fil du temps, son corps se développe et grandit. Adulte, il n’a plus la même taille que son enfance. Sa taille augmente. Son poids aussi grossit. Il devient jour après jour plus grand. Ses os, ses muscles… et tout son corps se développent. Sa capacité physique est en croissance. Il gagne en force, en puissance. De même pour son mental qui gagne aussi en intelligence. Il est le seul être vivant capable d’intelligence, car doté de ce qu’Aristote appelle l’« âme intellective ». Il gagne à tous les niveaux en croissance. Cette croissance est visible chez tout être vivant. L’animal, la plante, sont eux aussi en croissance comme l’homme. Tous les autres êtres privés de vie sont dépourvus de croissance ; ils sont étrangers au développement. Aussi une pierre ne peut jamais connaître une croissance.  

Pour assurer sa croissance, un organisme vivant a besoin de ressources extérieures. Tout organisme vivant doit donc extraire de son environnement extérieur ce qui est nécessaire pour sa vie et sa croissance. De ce fait, un être vivant nécessite des besoins vitaux indispensables pour son fonctionnement et pour sa croissance. Il a besoin de nourriture et d’eau en plus de l’air. Sans nourriture et sans eau, il ne peut pas pouvoir vivre. Quand tous les besoins vitaux sont assurés, la croissance se développera. Notons aussi que la croissance est biologiquement programmée, ce n’est pas une croissance qui se fait aléatoirement. Chaque être vivant, selon son espèce et son genre, connaitra une croissance déterminée, chronométrée, graduée. L’homme, par exemple, connait une croissance qui passe par plusieurs étapes avant de passer à une autre phase de décroissance. L’être humain passe de l’enfance à l’âge adulte durant sa croissance et ensuite de l’âge adulte à l’âge de vieillesse qui ouvre une nouvelle étape de  décroissance physiologique et mentale.

 

Un être vivant aussi a la capacité de se reproduire. Il est capable de donner naissance à des nouveaux individus semblables à lui. Comme sa croissance, sa reproduction est également biologiquement programmée. La reproduction de chaque être vivant est naturellement déterminée. Chaque espèce reprodroduit des individus identiques à l’espèce à laquelle il appartient. Un être humain ne peut reproduire qu’un être humain comme lui, appartenant à la même espèce que lui. Un humain ne peut pas naturellement reproduire un individu extérieur à son espèce. Un couple humain ne peut pas normalement enfanter un animal ou une plante. Ca sera la même chose  pour tous les autres êtres vivants. La reproduction animale ou végétale ne déroge pas à cette loi naturelle. La reproduction conserve ainsi la continuité de l’espèce.

Par la reproduction, la vie continue. On donne naissance à un être, à un corps, mais aussi à une vie, à un être vivant portant une vie. Par la reproduction nait mystérieusement un être identique à son espèce, ressemblant à ses parents, animé et vivant. Il importe, cependant, de préciser que la reproduction ne se fait pas identiquement chez tous les êtres vivants. La grande partie des êtres vivants se reproduisent entre eux, avec l’accouplement entre deux individus de différents sexes. Mais pour une partie des vivants, et surtout pour certains  micro-organismes parasitaires, la reproduction se fait d’une manière asexuée. Elle ne nécessite pas sexuellement une fécondation et un accouplement. Elle se fait sans activité sexuelle aucune. Quelle que soit la forme de reproduction concernée, la reproduction est un phénomène propre qu’aux êtres vivants. Un être qui n’est pas vivant ne peut nullement se reproduire. Une pierre, par exemple, est incapable de se reproduire, de féconder une autre pierre pour procréer une nouvelle pierre.

En enfin, avec Aristote, on peut dire que tous les vivants ne sont pas les mêmes. Il y a des qualités qu’ils partagent tous et des qualités qui sont propres seulement à certains vivants. Aristote propose un classement des vivants en distinguant trois formes d’âmes : l’âme végétative, l’âme locomotrice et l’âme intellective. L’âme végétative est associée à la croissance et à la reproduction. Elle est donc commune à tous les êtres vivants. En effet, la reproduction, la croissance et l’organisation sont des caractéristiques communes à tous les vivants, les animaux, les végétaux et les humains.

Par contre, la sensation et le mouvement sont des fonctions qui sont communes seulement aux animaux et aux hommes. Les plantes ne sont pas capables de sentir, elles n’ont pas d'organes sensoriels comme les animaux et les hommes. Elles ne sont pas non plus capables de se déplacer et de se mouvoir. Ainsi l’âme locomotrice, responsable de la sensibilité et du mouvement des vivants, est seulement commune aux animaux et aux hommes. Seuls les hommes et les animaux peuvent marcher, se déplacer et faire des mouvements physiques.

Et enfin, l’âme intellective est propre aux hommes ; elle est associée à la pensée, à l’intelligence et la connaissance. L’homme se distingue de tous les autres êtres vivants par l’intelligence. Il est le seul être capable de penser, de réfléchir. Aristote accorde une « âme intellective » ou ce qu’il appelle la « fonction cogitative » à l’homme. Il place l’homme au sommet du règne du monde vivant. Et après lui, Descartes, Pascal défissent la grandeur et la dignité de l’homme par sa pensée ou le cogito. Descartes accordera ainsi plusieurs siècles après Aristote, la pensée uniquement à l’homme. Il soutient que le langage est la marque de la pensée humaine, une intelligence qu’il refusera à tous les animaux y compris au perroquet l’animal capable de répéter les mêmes mots que les hommes.  Quant à Pascal, il accordera à l’homme une dignité et une valeur suprême qu’aucun autre être qu’il soit vivant ou non ne peut avoir.

 

II. La connaissance du vivant

 

Comme on vient de le voir, un être vivant se caractérise par sa capacité de mouvement, de croissance et de reproduction. C’est un être qui a la particularité de se mouvoir, de croître ; c’est un être animé. Mais qu’est-ce qui l’anime ? Pour Aristote, l’être vivant est une « substance composée ». A la différence des autres êtres naturels non vivants, l’être vivant se décompose d’un corps, d’une matière et d’une âme. Le corps vivant tire son principe de vie à partir de l’âme qu’il abrite en son sein. De ce fait, les vivants se distinguent par l’âme des non-vivants. Tous les êtres naturels (non vivants) sont des substances simples, uniquement constituées de matière. Ils sont privés d’âme, et donc de qualités des vivants.

On peut donc comprendre que le vivant n’est pas comme les autres êtres inanimés. C’est un être qui a une vie intérieure, une sensation, une pensée qu’aucun autre être vivant ne peut saisir. D’où la problématique relative à la connaissance de l’autre. Il n’est pas possible, contrairement à la matière inanimée, de connaître ce que vit un être vivant. On peut observer depuis l’extérieur des manifestations qui laissent entrevoir ce qu’il ressent ou ce qu’il pense. Mais on ne peut pas avoir une connaissance scientifique objective et rigoureuse sur sa vie intérieure. Seul l’être vivant peut faire l’expérience de sa propre vie intérieure. Il faut pouvoir vivre ce qu’il vit pour pouvoir connaitre le vivant de l’intérieur. Ce qui est scientifiquement impossible. La connaissance scientifique cherche à connaitre objectivement et donc de l’extérieur l’objet de sa connaissance. Elle ne vise pas une connaissance subjective ou intime de la chose.

Consciente de sa limite, la science, et particulièrement la biologie, se contente, faute de pouvoir avoir une connaissance profonde du vivante, à une connaissance objective du vivant. La biologie qui est la science de la vie étudie donc du vivant que ce qu’elle peut observer sur lui : elle étudie ses phénomènes observables : ses comportements, son corps, ses  activités, etc. La biologie se veut donc mener une étude physique sur le vivant en tant que matière et non en tant que vivant parce qu’elle ne peut pas avoir accès à la dimension métaphysique de l’être vivant. Elle se base sur une conception mécaniste du vivant ; une conception qui sera défendue par le philosophe Descartes. Le philosophe nous invite à comparer le vivant à une machine telle une horloge et de considérer les comportements des vivants comme des mécanismes physiques et chimiques purement mécaniques. Pour Descartes, les vivants peuvent être ainsi assimilés à des machines. Il écrit à ce propos : « je ne reconnais aucune différence entre les machines que font les artisans et les divers corps que la nature seule compose ». A cette seule différence, que, selon lui, les « tuyaux » et les « ressorts » des machines sont visibles et grandes alors que ceux des corps naturels sont si petites et donc imperceptibles.

En ce sens, on peut comparer le cœur du vivant à une pompe mécanique qui pompe le sang qui coule dans les veines pour les distribuer aux différents organes. Il s’agit donc là d’une connaissance mécanique du vivant et non d‘une connaissance qui touche ce qui fait la spécifité du vivant, c’est-à-dire le mystère de la vie et la beauté du monde vivant. Cette conception mécaniste, même si elle a l’avantage de connaître davantage la dimension physique du monde des vivants, est, en réalité, une conception qui passe à côté de ce qui fait le propre du vivant, la vie. C’est pourquoi elle sera contestée par la philosophie vitaliste. En ce sens, Kant fait observer que la matière ne peut pas produire une nouvelle matière par reproduction. Certes deux corps peuvent interagir chimiquement pour donner un nouveau corps, mais ils ne peuvent pas se reproduire entre eux. Il affirme ceci à ce propos : « Un rouage n’est pas la cause efficiente de la production d’un autre rouage ». Un homme et une femme peuvent se reproduire pour donner naissance à un nouvel individu humain (un petit bébé), mais une montre et une autre montre ne peuvent pas produire une nouvelle montre, une montre ne peut pas non plus se réparer par elle-même, se corriger, etc. Ainsi, on peut soutenir avec Kant que le vivant possède une « force formatrice » en plus de sa « force motrice », une force formatrice qui effectivement manque à la machine.

Toujours concernant la connaissance du vivant, la philosophie avance une autre conception à propos du vivant. C’est ce qu’on appelle le finalisme. Le vivant n’est pas un chaos. Ce n’est pas un être de désordre. Chaque organe et la vie même de l’être vivant semblent suivre une finalité. Etant un organisme, le vivant est un tout véritablement finalisé. Chaque organe suit une fin propre à lui. En ce sens, le poumon a pour fonction de permettre à l’être vivant de pouvoir respirer, d’apporter un oxygène aux cellules du corps. Et sa nature correspond à sa finalité. Aucun autre organe du corps vivant ne pourra remplacer la fonction d’un autre organe. Le cœur ne peut pas, par exemple, remplacer les poumons, et  vice-versa. Ce finalisme de chaque organe concourt à un finalisme plus global, la finalité finale du vivant : la conservation de la vie. Le finalisme implique alors l’idée d’une intelligence suprême, d’un créateur et d’un Dieu. Chez l’homme particulièrement, la conception finaliste met à mal la liberté de l’homme, car le finalisme suppose un déterminisme biologique.

Finalement, la connaissance scientifique du vivant soulève une problématique éthique. Avec le développement de la connaissance génétique et biologique du vivant, l’étude du vivant devient de plus en plus inquiétante sur le plan éthique. La maitrise biologique de la génétique moléculaire a permis aux scientifiques de pouvoir manipuler le génome du vivant : ils parviennent à cloner des êtres vivants, à modifier génétiquement certaines organismes vivants (végétaux, plantes), à procréer artificiellement, etc. La bioéthique s’inquiète des éventuelles dérives de ces pratiques scientifiques qui peuvent avoir des conséquences terribles dans le monde du vivant. Pour la bioéthique, la science biologique doit évaluer la portée de ses pratiques sur le vivant. Car le vivant est un être particulier, comme on l’a vu, capable de sensation (douleur, par exemple), comme c’est le cas chez l’animal. Et c’est particulièrement chez l’homme, que la bioéthique est la plus engagée. Il est un être vivant à part,  doté de dignité et de liberté. Un être qui est une fin en soi et qui ne peut en cas être traité comme un moyen en vue d’une fin quelconque. La bioéthique cherche ainsi  à moraliser la science pour avoir une avancée scientifique respectueuse d’un point de vue éthique du vivant et de la vie humaine en particulier. 

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